Hervé, un profil en long du paysage…
10ans | 6 juillet 2009Hervé, pouvez-vous vous présenter ?
Hervé Halbout. J’ai 53 ans. J’ai suivi une formation initiale littéraire spécialisée en linguistique et rhétorique dans les années 1975-80 (licence). Intéressé de longue date par la géographie, j’ai repris ensuite un cursus complet en géographie physique pour devenir géomorphologue. Mon sujet de thèse en 1988 portait sur l’établissement d’une cartographie du sous-sol de la ville de Caen, avec interprétation des données géologiques et géomorphologiques, en lien avec l’occupation humaine (archéologie), en utilisant la 3D (à l’époque, le TIN d’ArcInfo).
Mes débuts dans les SIG : en ligne de commande par la manipulation d’ArcInfo 4 en aml … quelques cheveux en moins à l’époque ! Autoformation en informatique et prise en main de Corel Draw (v.5) pour établir des cartes d’exposition pour le Musée de Normandie (Caen). A l’époque, il n’existait aucune formation en géomatique à l’université de Caen et l’offre de formation continue était dans notre domaine inexistante.
Cela fait 14 ans que je suis consultant SIG indépendant [1]. Tout a commencé par une étude de mise en place d’un SIG transversal pour le Conseil Général du Calvados. Déjà à l’époque (1996) nous avions organisé une acquisition mutualisée de données.
En début d’année 2009, je me suis associé avec Nathalie Dejour (Decigis) pour unir nos compétences très complémentaires.
[1] ndlr : Halbout Consultants
Quel est votre violon d’Ingres ?
Le SIG, car il faut être passionné pour en faire.
Le sport : pratique régulière d’aviron, de roller, de badminton, …
…mais surtout fana de moto ! ma première vrai moto : une Yamaha 500 XT, mono cylindre mythique !
Plus de 17 000 km parcourus en solitaire avec ce modèle, en Afrique du nord, en 1981. Cela reste un grand souvenir, tant par le voyage que par la découverte du désert.
Quelles sont les évolutions notables de votre activité ces N dernières années ?
Côté données :
La disponibilité d’un référentiel orthophoto à grande échelle sur la France entière ; une véritable révolution en terme de géomatique (et je ne parle pas uniquement de la BD Ortho). La superposition du cadastre sur un référentiel ortho a permis la mise en place de nouvelles applications métier.
Côté applicatifs :
Evolution prédominante de l’informatique ces 15 dernières années : augmentation de la capacité de stockage, puissance de calcul, débit réseau et surtout la généralisation d’internet.
La fin des années 1990 a été marquée par l’apparition des premiers outils de webmapping professionnels (MapGuide, GeoMedia Web Map, …). Le Conseil Général du Calvados a ainsi publié dès 1998 des données géographiques vecteurs et alphanumériques sur internet via MapGuide 2.5 et obtenu une autorisation conventionnelle de publication de la BD Carto sur le web avec l’IGN (convention pour une somme modique à l’époque, si ! si !).
Le développement d’internet a été un véritable tournant qui a permis de faire sortir l’information géographique de son anonymat. Par ailleurs, nous avons assisté à une diversification des SIG à travers de nombreuses thématiques métiers telles que la gestion du patrimoine, le géomarketing, …
D’après vous, vers quelles directions se situe l’avenir de la géomatique ?
Trois domaines :
L’interopérabilité : la spatialisation de l’information va nécessiter une codification et une description des données, la mise en place de catalogues de données pour organiser l’information. Cela va nous occuper les 10 prochaines années.
La 3D : cela va nous permettre de gérer le territoire de la ville numérique en 3D aussi bien pour ce qui concerne le sur-sol que le sous-sol. Sur le modèle suisse, des formations sont à construire de ce côté-là pour une meilleure adéquation entre l’offre de formation et la réalité du terrain.
L’Open-source : au départ complètement à la marge dans le milieu SIG, l’open source amène désormais des alternatives viables et pertinentes.
Quelle est votre perception de la géomatique en France par rapport aux autres pays (d’Europe, d’Amérique du Nord, d’Asie, d’Afrique) ?
Le Québec est un bon exemple d’implantation de la géomatique, il est d’ailleurs le berceau de notre discipline, car inventeur du terme « géomatique ».
Les Etats-Unis sont connus pour l’offre de données libérées.
La Suisse et d’autres pays d’Europe ont aussi une certaine avance sur nous (loi sur la géoinformation en Suisse, par exemple).
Nous sommes à niveau par certains côtés (construction de référentiels, mutualisation) et par d’autres plutôt en retard (cadastre, 3D, formation, …).
La crise économique a-t-elle un impact sur vous ?
Par rapport à d’autres secteurs, nous ne sommes pas touchés de la même manière : l’information géographique peut apporter une optimisation d’un certain nombre de coûts (suivi de flottes, optimisation d’itinéraires, …) voir même permettre aux collectivités de gagner de l’argent (retour sur investissement par rapport aux dépenses de carburants par exemple). Les consultants peuvent être un plus pour cela.
Quel est votre avis, votre regard sur l’open-source ?
Regard de convaincu … parmi les premiers à être inscrit sur la liste OSGeo-fr. A l’heure actuelle les outils open-source dans la géomatique ne peuvent pas remplacer toutes les infrastructures logicielles, mais ils apportent une vraie complémentarité et des offres mixtes.
De plus, la communauté open-source apporte une fraîcheur certaine et un dynamisme important au secteur.
Quel est votre avis, votre regard sur les globes virtuels (Google Earth, Virtual Earth, Nasa World Wind) ?
C’est un véritable tournant dans la géomatique (grand public). Cela a permis de démocratiser la cartographie pour le plus grand nombre, mais aussi de mettre en évidence les enjeux de diffusion des données. C’est le développement de nouveaux usages.
Les mashups sont aussi un support pour le croisement d’une quantité très importante de données géographiques d’origines diverses.
Aujourd’hui, avec Google on fait beaucoup de choses en cartographie, mais on ne fait pas vraiment du SIG. De plus, il faut faire attention aux excès : je reste dubitatif pour certaines fonctionnalités telle que StreetView, vis à vis de la vie privée, par exemple.
De même, l’imagerie aérienne avec une précision de quelques cm ou encore la géolocalisation à outrance pour les aspects commerciaux sont des domaines où l’on risque d’aller trop loin sans s’en rendre compte.
Que diriez-vous à un jeune qui hésite/qui pense à faire des études de géomatique ?
Qu’il y a d’autres métiers (bâtiment, …) : plombier c’est pas mal et ça paye plus !
Avant de choisir : il est important qu’il ait une idée précise sur le métier qu’il veut faire et comment il veut le faire. Il ne doit pas hésiter à effectuer des stages sur des sujets concrets, bien définis qui lui permettront de combler le décalage existant trop souvent entre la théorie universitaire et la pratique terrain.
Depuis combien de temps connaissez-vous GeoRezo, et comment êtes vous arrivé à le connaitre ?
Depuis le siècle dernier (2000) !
Qu’appréciez-vous le plus, qu’appréciez-vous le moins sur GeoRezo ?
La liberté de ton, l’ouverture des débats tout en étant cadré, car c’est la force de GeoRezo : un forum d’échanges entre professionnels, sans être un exutoire à géomaticiens.
C’est en quelque sorte un réseau social de la géomatique. Ce n’est pas uniquement un lieu d’échanges, d’états d’âme, mais surtout un espace de travail collaboratif autour de notre métier.
GeoRezo est unique. S’il n’existait pas il faudrait l’inventer. La position de cet ovni est difficile à tenir car reposant intégralement sur du bénévolat : participation altruiste des membres de l’association. Et pourtant, ça marche !
Quels services utilisez-vous sur GeoRezo (forums, Job/CV, Biblio, Agenda, Annuaire, Wiki, Blogs) ?
La rubrique appels d’offres et les forums logiciels.
Que pensez-vous de GeoRezo ? Lâchez-vous !
Indispensable !
Quelle question aimeriez-vous poser à GeoRezo ?
Jusqu’à quand GeoRezo pourra-t-il tenir dans son modèle actuel ?
J’espère le plus longtemps possible car il répond à un besoin qui n’avait jamais été exprimé auparavant. C’est un réseau qui a su s’adapter aux demandes des uns et des autres, une auberge espagnole en quelque sorte : chacun, de tous horizons confondus, vient y apporter et y trouver ce qui l’intéresse, dans le domaine qui le concerne.
Quelle question souhaitez-vous que GeoRezo vous pose ? … et quelle est votre réponse à cette question
Peut-on rire et sourire de la géomatique ?
Le jour où je ne pourrai plus rire du sujet, je pense que je changerai de métier.
Le métier de consultant c’est à la fois une certaine liberté et une importante créativité. Le revers est que l’on ne vit que de ce que l’on gagne
Sélectionnez dans les archives des forums du GeoRezo vos échanges préférés, ceux qui vous ont marqué, amusé, étonné, énervé…
• Numérisation du cadastre et sécurité nationale (mars 2006)
Pourquoi ce choix :
le sujet du cadastre est inépuisable et m’a toujours intéressé.
• Une puce révolutionne le cadastre (juin 2005)
Pourquoi ce choix :
l’équivalent du cadastre en Inde : article intéressant.
• Quand Google earth joue la carte d’Israél (Octobre 2006)
Pourquoi ce choix :
Ah ! la manipulation cartographique : il était temps d’en parler
• Vivre la Géographie (Avril 1999)
Pourquoi ce choix :
il y a toujours des sujets étonnants sur GeoRezo !
Hervé, merci !
Propos recueillis par l’équipe du GeoRezo
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