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Un point de vue sur Open/big data et l’administration

(Pour une revue interne (et underground), j’ai rédigé un éditorial pour tenter de faire un point sur les enjeux du jour : ouverture des données publiques, Big data et évolution des TIC dans les administrations. Les lecteurs n’étant pas des spécialistes, cela paraîtra peut-être schématique à certains, et ce serait normal : ça l’est!)

Commençons par le Big Data, dont la popularité dans les colloques et les magazines croît à mesure que son sens se dilue. Si, aujourd’hui, le terme est banalisé, il y a deux ans, on appelait Big data un traitement de données nouvelles d’un volume d’un Teraoctet (1000 Gigaoctets) par jour. On y voyait principalement des applications marketing (connaissance des clients, par exemple pour Vogue France) et des applications scientifiques (physique des particules, génomique).
Dans cette ambiance vibrionnante, propre aux premières heures de l’émergence à la lumière de quelque chose de nouveau, le point le plus frappant était sans doute la forte présence de mathématiciens (et de statisticiens), fondateurs de jeunes pousses, bourgeons de l’école française des mathématiques.
L’ombre portée en était la certitude, vite acquise avant même la publicité donnée à la NSA, qu’il valait mieux que l’Etat en reste éloigné, au moins pour sa partie la plus régalienne, tant l’anonymat s’affaiblit.
Toutefois, l’inclusion de cette question dans l’un des 34 plans de la « nouvelle France industrielle » devrait aboutir sous peu à des recommandations précises, à défaut de couvrir sans doute tout le spectre des possibilités ainsi ouvertes.

A une autre extrémité du spectre, la politique des deux derniers gouvernements sur la donnée s’est focalisée sur l’open data, ou ouverture des données publiques. Lancée par François Fillon qui créa Etalab, elle est amplifiée par Jean-Marc Ayrault qui l »expérimentait dans sa ville de Nantes. Elle vise principalement à mettre à disposition gratuitement sur l’internet des données issues des services publics avec deux cibles : pour les habitants, augmenter la transparence du fonctionnement de l »exécutif, et, pour les entreprises, favoriser la création de valeur ajoutée par l’innovation. La personnalité d’Henri Verdier, actuel directeur d »Etalab et
serial entrepreneur, fait beaucoup pour populariser la démarche et l’étendre, par exemple aux acteurs de la société civile.

Les administrations sont organisées d’après leurs missions, c’est-à-dire en silo, et leurs systèmes d’information sont à leur image, logiquement orientés d’abord vers la satisfaction de leurs propres besoins. Une tension dynamique s’est créée entre ceux-ci et la politique open data. Une fois intégré que les données des ministères sont partageables, ce qui est loin d’être acquis, leurs SI doivent-ils prendre en compte les besoins des innovateurs en aval ? S’il est évident qu’une adaptation en amont, une fois pour toutes, éviterait des dizaines de fois la même tâche chez les utilisateurs, la plupart des administrations considèrent ce travail comme extérieur à leur mission, et n’affectent pas les moyens humains nécessaires à l’interopérabilité. Pourtant, ce sont elles qui profitent déjà, sans toujours le savoir, de la fluidité nouvelle des données entre services.
L’enjeu est aussi de faire mieux pour moins cher, et cette dernière considération prend une grande urgence.

Aussi, pour le moment l’impact du Secrétariat général de la modernisation de l’Etat, auquel appartient Etalab, sur le fonctionnement interne de l’administration peut-il sembler invisible. Pourtant, deux bonnes nouvelles, cette semaine, peuvent préfigurer que les travaux menés vont finir par nous toucher.

Chacun n’a pas manqué d’imaginer ce qu’il aurait pu financer, dans ses fonctions s’entend!, avec 230 M€. Mais l’abandon de l’idée d’un service unique de la paye montre un nouveau principe de réalité dans le développement des grands systèmes informatiques. Après Louvois ou d’autres (le dossier médical individuel…), on peut espérer que les prochains directeurs de projets favoriseront l’interopérabilité à la centralisation.

L’autre information positive est l’arrivée des sciences humaines, les nudges (!), qui visent à étudier les comportements pour adapter les services publics aux utilisateurs. Prendre acte qu’il est vain de vouloir adapter le public à l’administration et, souhaitons-le, d’adapter les administrations aux outils développés en chambre est vraiment une bonne nouvelle !

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