La valeur économique de l’information géographique sur le territoire
[Commentaire introductif du claviste : après le travail mené dans le cadre de SIG-LR il y a trois ans, il m’a semblé indispensable de faire connaître le travail de Narimène Dahmani, premier du genre à ce niveau sur le sujet, à la fois pour mieux faire comprendre la valeur des infrastructures d’information géographique et l’intérêt de se poser des questions de façon pluri-disciplinaire]
THÈSE soutenue le 16 décembre 2019 par Narimène DAHMANI, docteur de l’université de Strasbourg en sciences économiques.
Publication de ses conclusions avec l’autorisation de l’auteure.
1. Principaux résultats et contributions
Le Chapitre 1 a été dédié à l’étude des Politiques Régionales en matière d’Information Géographique (PRIG) et à la méthode d’identification du potentiel impact de ces politiques sur la manière d’évaluer l’information géographique.
Les principales contributions de cette étude sont la mise en évidence de la diversité des PRIG des territoires considérés, par exemple, au niveau des modèles organisationnels, des coûts des PRIG, ou encore des dispositifs complémentaires aux IDG.
Dans le Chapitre 2, l’essentiel de l’étude repose sur la mise en évidence des effets économiques de l’information géographique sur le secteur privé.
Nous avons établi un écosystème de l’information géographique représentant le paysage de l’information géographique dans le secteur privé. Un certain nombre d’indicateurs économiques permettent d’évaluer l’information géographique, par exemple, la part du chiffre d’affaire qui dépend de manière critique de l’information géographique. Nous avons pu tester ces indicateurs sur les acteurs situés en amont de notre écosystème : ces entreprises ont produit, a minima, 0.08% du PIB français de 2017, soit 2 052 209 172 euros.
Concernant les acteurs en aval de l’écosystème, c’est-à-dire les entreprises utilisatrices de d’information géographique, il a été démontré qu’un nombre considérable de secteurs d’activités dépendent fortement de l’information géographique. Le tourisme, les équipementiers industriels et l’immobilier en sont quelques exemples.
Les enquêtes réalisées avec les CCI ont permis d’obtenir un certain nombre de résultats quantitatifs. 25% des entreprises implantées sur les territoires étudiés sont utilisatrices d’information géographique.
Enfin, le Chapitre 3 a pour objectif de mettre en évidence les liens entre les PRIG et le secteur privé puis d’en déduire des diagnostics et des recommandations.
Les relations entre les acteurs du secteur privé et les IDG s’expriment de diverses manières. D’une part, les acteurs en amont de l’écosystème de l’information géographique ont une relation forte et avérée avec les IDG. D’autre part, il a été démontré que les liens entre ces dispositifs et les acteurs situés en aval sont plus faibles. En d’autres termes, les entreprises en tant qu’utilisatrices de l’information géographique, ont très peu recours aux IDG. Cela s’explique par trois éléments : une méconnaissance mutuelle et réciproque entre les entreprises et les IDG, un manque de compétences géomatiques de ces entreprises et une difficulté au niveau de la réutilisation des données géographiques par le secteur privé. Plusieurs recommandations, présentées dans ce travail, ont été proposées aux cinq Régions, telles que l’augmentation de la visibilité des IDG, une formation des entreprises aux outils techniques présents sur les plateformes ou encore le choix d’une ouverture plus importante des données géographiques.
2. Limites et extensions possibles
Notre travail a cependant quelques limites qui pourraient être prises en compte pour de futures recherches.
Une limite du Chapitre 1 est le manque de données pour certaines Régions, notamment en raison de la fusion de certaines d’entre elles en 2015.
Les principales limites du Chapitre 2 résident dans le manque d’observations concernant différents secteurs d’activité économique. Le manque de représentativité de l’échantillon et donc des réponses obtenues en est la conséquence majeure. Pour de futurs travaux, il serait intéressant de se concentrer sur un seul type d’activité et d’évaluer, de la façon la plus complète possible, l’utilisation de l’information géographique par les entreprises concernées.
L’absence de données chiffrées telles que les chiffres d’affaires ou encore la valeur ajoutée pour certaines entreprises utilisatrices d’information géographique constitue la seconde limite du Chapitre 2. Nous n’avons donc pas pu évaluer l’impact économique global de l’utilisation de l’information géographique pour ces structures. L’accès à une base de données telle que la base DIANE permettrait d’obtenir des éléments complémentaires.
Une autre piste de réflexion serait de reconduire les enquêtes de cette thèse en partenariat avec les CCI en incluant celles pour lesquelles nous n’avions pas d’information et les autres Régions du territoire français. Cette analyse plus complète permettrait de comparer les résultats d’une Région à l’autre mais aussi d’avoir un aperçu de l’utilisation des données géographiques au niveau national. Il serait également intéressant de répéter ce travail, sur plusieurs années, afin d’obtenir des données de panel et de pouvoir conduire une analyse économétrique qui mettrait en lumière la relation causale entre utilisation de l’information géographique et des indicateurs économiques de performance des entreprises.
Dans le Chapitre 3, nous estimons que les recommandations préconisées aux Régions pourrait être une nouvelle piste de travail. Nous avons établi un diagnostic puis proposé des outils pour pallier au manque d’utilisation des IDG par le secteur privé comme des journées de formation aux outils techniques ou une augmentation de la visibilité des IDG. Nous pourrions mesurer la valeur des IDG sur le secteur privé avant et après la mise en place de ces recommandations.
Enfin, pour de futurs travaux, nous proposons d’évaluer la mise en place des recommandations du Chapitre 3, notamment à travers des questions que l’on pourrait retrouver dans les enquêtes CCI.