La complexité de la gestion du territoire, urbain, voire péri- urbain, impose de plus en plus l’usage concerté de données d’origines variées. Les villes virtuelles se retrouvent à l’interface de plusieurs mondes qui n’étaient pas connectés. La gestion des bâtiments a été dans un premier temps assurée à l’aide de logiciels souvent issus de la CAO comme les suites Autodesk ou Bentley. Les données CAO comprenaient des modèles détaillés de bâtiments et des modèles liés à l’environnement (mobilier urbain,…). La mise en place d’une description du bâtiment et de son environnement, donnant naissance aux BIM [BIM] répond aux besoins de gestion de celui-ci. Les données BIM contiennent des informations sur leur structure, l’utilisation et l’équipement de bâtiments ainsi que la modélisation de leur intérieur et extérieur.
La rencontre du monde du SIG et de celui de la gestion technique du patrimoine a donné naissance à un standard proposé par l’OGC depuis 2008 pour le stockage, l’échange et la représentation des données liées aux modèles de villes. Il s’agit de CityGML [OGC-CityGML]. CityGML est défini comme un schéma d’application de GML 3.1.1 ; la spécification définit à la fois une modélisation UML et un encodage du modèle au format GML.
Les caractéristiques clés de CityGML sont :
- Modélisation thématique : le modèle couvre une large gamme d’objets urbains, y compris (mais non limité à) les bâtiments, les réseaux de transport, l’hydrographie, la végétation, le relief du terrain, l’occupation des sols, le mobilier urbain…
- Modularité du modèle : chaque modèle thématique est packagé dans un module UML séparé.
- La gestion du multi-échelle (de la région au bâtiment) avec le concept de LOD (« Level of Detail » ou Niveau de détail) permettant d’exprimer la résolution ou granularité avec laquelle un modèle 3D est représenté. Le même objet peut être représenté avec une géométrie différente à chaque niveau. CityGML fournit aussi deux associations d’accumulation et de décomposition entre les objets qui peuvent être utilisés pour indiquer qu’un objet de LOD de niveau inférieur a été décomposé dans deux (ou plus) objets à LOD plus élevé. Les modèles applicatifs ou de simulation peuvent exploiter les données au LOD le plus approprié. CityGML spécifie cinq niveaux (voir figure 1) :
- LOD0 : régional, représentation du terrain : une orthoimage ou une carte peut être drapée sur un modèle numérique de terrain, avec des données de niveau régional d’occupation des sols, d’hydrographie et de réseaux de transport.
- LOD1 : vue urbaine. Les bâtiments sont modélisés sous forme de bloc à toits plats.
- LOD2 : quartier, projets. Les bâtiments sont modélisés avec leur structure de toit, et des surfaces délimitatives sémantiquement classifiées. Des objets de végétation, de mobilier urbain et de réseau de transport plus détaillés peuvent également être modélisés.
- LOD3 : modèle architectural (extérieur) et infrastructures ou objets urbains. Les structures détaillées des façades et des toits, p.e balcons, fenêtres sont modélisées, ainsi que les textures « haute résolution », les objets de végétation, de mobilier urbain et de réseau de transport détaillés.
- LOD4 : modèle architectural (intérieur). Ce niveau a été conçu en cohérence avec le modèle IFC (standard permettant de modéliser les intérieurs et extérieurs de bâtiments). Le LOD 4 permet donc de décrire la géométrie intérieure d’un bâtiment, ainsi que les portes, escaliers …
- Références externes: les objets de bases de données externes peuvent être référencés à partir du bâtiment ou de l’objet urbain auquel ils correspondent. Ils peuvent être utilisés pour propager des mises à jour de la base de données source à l’objet urbain 3D. Ils aident également à relier les modèles d’information différents. Un bâtiment peut par exemple être lié à un objet d’une base de données cadastrale.
- Capacité d’extension « orientée métier » grâce aux extensions ADE (Application Domain Extensions) de CityGML. Des extensions ADE pour des modèles de bruit, la représentation de ponts, tunnels, hydro et réseaux (Utility Network), ainsi qu’une extension GeoBIM (basée sur les IFC) sont disponibles ou en cours de développement.
D’autres extensions dédiées aux différentes problématiques sont envisageables et permettraient d’enrichir le modèle urbain socle en utilisant des informations nécessaires aux simulations. La version 1.1, en cours de mise en place à l’OGC, définira ainsi un ensemble d’extensions standardisées à la version 1.0, parmi lesquelles : tunnels, ponts, murs isolés, modélisation de l’emprise 2D des bâtiments pour une meilleure intégration 2D/3D.
En conclusion, la modularité de CityGML, sa capacité à représenter différents niveaux allant du territoire à l’intérieur du bâtiment, sa structure thématique, ses capacités de référencement externes et d’extensibilité permettent le support de modèles urbains enrichis intégrant des données provenant de diverses sources en offrant ainsi un lien avec les autres domaines d’application.
Pour en savoir plus, vous pouvez consulter le wiki dédié à ce projet [WikiCityGML]. Une rapide présentation est aussi disponible en podcast [PodCastCityGML]. Un cours de 5 heures très complet en anglais est aussi disponible [CoursCityGML].
Rédacteurs : Gilles Gesquière, Emmanuel Devys, Marie-Lise Vautier
Références pour en savoir plus :
[OGC-CityGML] : Standard CityGML à télécharger sur le site de l’OGC : http://www.opengeospatial.org/standards/citygml
[WikiCityGML] http://www.citygmlwiki.org
[BIM] Building Information Modeling, http://en.wikipedia.org/wiki/Building_Information_Modeling
[PodCastCityGML] : Podcasts de présentation de CityGML : http://itunes.apple.com/fr/podcast/the-city-geography-markup/id366672189
[CoursCityGML] : Cours en anglais de 5 heures http://collegerama.tudelft.nl/mediasite/SilverlightPlayer/Default.aspx?peid=7b440617cd1342b0b5b006fc0f6563ef1d